La vogue menthe à la bouche et un pull en cachemire couleur bubble-gum, Haru vous sourit. Elle est comme ça, à aimer donner de la joie aux gens, surtout ceux qu’elle ne connaît pas. Profitez-en, vous clignez des yeux qu’elle est déjà partie. Si vous avez un peu de chance, elle vous emmènera avec elle, préparez-vous simplement à faire un pacte, Pinky promise, de ne rien révéler et de ne surtout pas la quitter, du moins pour ce soir. Le ciel sera plus bleu que jamais, la nourriture encore plus gouteuse qu’autrefois. Vous garderez probablement des souvenirs impérissables de son large sourire et sa fausse naïveté. Pourtant, le lendemain, les traits de son visage s’effaceront, il ne vous restera que des ombres évaporées et un faux numéro qu’elle vous aura laissé.
Haru n’est pas une personne de confiance, pour la simple et bonne raison qu’elle n’aime pas le passé. Pour elle, l’idée même d’éternité n’est qu’un mythe inventé par des ménagères lassées de leur propre vie, cherchant une excuse pour pardonner la routine qui s’installe, telle une conasse. Pourquoi vouloir toujours répéter la même chose? Pourquoi vouloir toujours se réveiller au même endroit, avec la même personne? Quel en est l’intérêt? Barbi est en recherche continuelle de cette première fois, ces papillons qui vous descendent l’estomac, si proche du gout de l’ecstasy et aussi doux qu’un bonbon à la réglisse. C’est son démon.
Dans ses rares moments d’égarement, la blonde platine se dit que sa vie serait surement plus appréciable si elle pouvait se contenter de peu. Si seulement elle arrivait à trouver un putain de soulier de verre qui aille à son pied, elle aurait la satisfaction d’arriver à se poser, ne serait-ce que quelques années, quelques mois, même deux trois jours seraient suffisants. Connaitre le bien-être d’être dans les bras de quelqu’un que l’on se permet d’appeler « poussin », le plaisir d’un au revoir qui n’est pas un adieu et la possibilité de se dire que cette personne nous appartient. Mais l’idée même de répétition effraie Haru, si fort que ses yeux deviennent humides. La jeune femme a déjà essayé de se changer, écoutant ses proches et leurs complaintes incessantes sur le manque d’engagement dans sa propre vie. Raté.
Parfois, elle a l’impression d’être une simple spectatrice de son destin, l’âme séparée de son propre corps à regarder cette étrangère qui passe de ville en ville, d’homme en hommes et des rires aux pleurs sans aucune pause.

o1 ⊱ TAKE THE CANYON - Un aller simple fut suffisant pour séparer Kobayashi de son passé. Une valise rose, trois jeans et deux paquets de cigarettes en poche était tout ce dont elle avait besoin pour survivre. L’air de Tokyo devenait irrespirable, l’atmosphère étouffante, une réalité qui la faisait se sentir claustrophobe. Personne ne comprit sa décision, elle n’en avait que foutre, ce jour-là elle avait décidé de ne penser qu’à elle, pour une fois. Les idéaux de ses deux géniteurs ne collaient pas à sa philosophie de vie, à ses projets, à ses visions; La petite poupée modèle se brisa, la porcelaine tachée de sang aussi rouge que les lèvres de sa mère. Les premiers pas sur les contrées coréennes furent difficiles, l’inattendu avait un gout amer mais particulièrement excitant. Une sensation qu’elle recherche toujours aujourd’hui, entre nostalgie et renouveau, un cocktail paradoxal qui vous rend ivre dès la première gorgée.

o2 ⊱ THINKING OUT LOUD - Aucune attache, Kobayashi était seule. Ce fut une sensation nouvelle, brusque mais exceptionnel. Les politesses furent vite oubliées, laissant place à une détente désarmante qu’elle eut plaisir à cultiver. Ici, il ne s’agissait pas d’un nouveau personnage, non, mais plutôt d’une mue; Haru se débarrassa de son ancienne peau, devenue trop serrée pour elle afin de laisser place celle qui aurait dû être là dès le commencement. C’était presque comme rencontrer une personne que l’on attendait depuis un long moment, se penchant toutes les trente secondes pour l’apercevoir à travers la porte vitrée. Et puis la voilà, elle arrive, non annoncée, un bouquet d’orchidées en main, les yeux rieurs: la nouvelle moi. Une conversation entre cette inconnue et Haru s’installe, les premiers moments sont maladroits mais forts en sentiments allant de la surprise à l’inquiétude en passant par l’amusement. Où était elle toutes ces années, on ne le saura surement jamais, l’essentiel c’est qu’elle soit là aujourd’hui et qu’elle ne parte plus jamais.
 
o3 ⊱ BLANCHE - Sa couleur jadis. Au Japon, le blanc symbolise la pureté, l’élégance et le raffinement. Autrefois signe de noblesse, les Parents de Kobayashi mettaient un point d’honneur à ce que leur fille soit l’image même de cette couleur qui n’en est pas une. Ingérer des aliments digestes et une protection constante du soleil l’aidait à ne pas gâcher ce cadeau de Dieu, comme sa mère l’appelait. Aujourd’hui tout a changé. Le rose bonbon a remplacé le fade blanc, laissant place à une nouvelle vision de la vie. Le soleil, devenu son ami, rougit sa peau sans gêne, faisant apparaitre des taches de rousseur, « salissant » le travail de maman. Le seul blanc restant chez la jeune femme sont ses cheveux et cette large rangée de perles qui lui sert de sourire, parfaitement taillées, qu’elle expose à outrance.

o4 ⊱ HONEST - Pourquoi doit-on cacher nos vices? L’idée même de plaisir est tellement taboue dans notre société puritaine qu'il est réduit à être dissimulé, closet freak, comme une honte, une abjection. Les contradictions se multiplient, ne laissant place qu’à une confusion générale pour la gente féminine. Si une femme est trop vocale quant à ses désirs, c’est une pute, si elle le joue plus calme, c’est une coincée. En gros les hommes veulent une princesse dans la rue et une salope au lit, mais ce n’est pas eux qui décident de notre attitude, et surtout pas de l’utilisation de notre propre corps. Une bite à la place du cerveau, ils pensent qu’une femme qui assume pleinement sa sexualité n’est pas digne de confiance, nulle à marier, mais il tirerait leur coup sans problème, vous laissant sur le carreau, les joues striées de mascara. Mais ici c’est Haru qui tire les mecs, pas le contraire. Elle prend ce qu’elle veut, elle flirte dangereusement, séduit, envoute et les fout à la poubelle une fois que c’est fini. C’est elle qui laisse le faux numéro, les laissant paralysés par la honte et l’angoisse de ne plus jamais la revoir.

o5 ⊱ KIM JONG UN - Incontrôlable. Haru est un free spirit qui ne connaît aucune limite. Le raisonnable? Elle ne l’assimile pas, la morale encore moins. YOLO prend tout son sens lorsque l’on passe une nuit avec la belle, les inhibitions au placard, la bienséance jetée au vent comme un prospectus donné dans la rue dont on ne prend même pas la peine de le lire. La vie est une salope alors niquez là. Chaque situation improbable que vous pouvez imaginer, elle l’a vécu, tout ça multiplié par cent : voler une voiture, déchirer une amande à la gueule d’un policier, threesome avec deux de vos meilleures amies, pisser dans un sanctuaire religieux… Et j’en passe. Le correct n’existe pas pour elle, l’incorrect est un style de vie. Rien n’est fait dans la méchanceté, uniquement dans la spontanéité. Chaque jour qui passe est une occasion pour Kobayashi de défier l’autorité, repousser l’interdit et se donner des frissons à travers tout le corps. Une de ses meilleures expériences fut lorsqu’elle cria « FUCK YOU KIM JONG UN » à la northern limit line, sans t-shirt, sans soutien-gorge, les mains en l’air et les yeux pleins d’étoiles.

o6 ⊱ DUALITY - Haru a le cul entre deux chaises, littéralement. Elle a l’impression d’avoir deux vies, deux amants entre lesquels elle partage son temps. D’un côté, elle est cette jeune femme pleine de fougue, sans aucune peur et aucun regret, de l’autre, une petite fille apeurée, prête à se cacher sous le canapé à la simple mention du mot "responsabilité" . Bien sur, le coeur de la belle ne balance pas, elle est certaine que son côté impétueux l’emporte sur le plus sérieux, mais elle se demande régulièrement si l’un existerait sans l’autre. C’est comme le yin de son yang. Elle commence à réaliser que pour vivre sa vie pleinement elle doit faire face à cette cette deuxième personnalité et l’apprivoiser, apprendre à vivre avec et ne pas la cloitrer dans un placard, car elle resurgira toujours à un moment.

o7 ⊱ EASY - Éternelle insatisfaite. Haru est une crème; large sourire, générosité à revendre, oreille attentive. Pourtant la plupart de ses proches connaissent une certaine dualité chez Kobayashi. Elle souffle le chaud et le froid dépendant de son humeur et de ses angoisses personnelles. Pile électrique, la belle a un besoin constant que les choses bougent, que rien ne stagne. Seulement lorsqu’un moment de tranquillité rassurant pointe le bout de son nez à l’horizon, Haru panique, Haru s’agite. Dans ces moments-là, Kobayashi devient une actrice, personnage principal de sa propre histoire. Telle une Mansfield des années 2000, Barbi se met en spectacle, Barbi s’égosille, elle s’abat et se débat telle une lionne affamée sortie de sa cage. C’est malsain, elle le sait. C’est une vraie professionnelle du «je te claque et je m’excuse ». Haru a l’art de tourner un bon moment en un véritable enfer en un battement de cils. Au début, ses excès de violence sont divertissants, ils intriguent, amusent, ça donne de la couleur au personnage. Mais après quelques essais, ça lasse, ça fatigue et ça laisse des cicatrices.

o8 ⊱ PRAY YOU CATCH ME Insaisissable. La belle a beau avoir posé ses valises roses à Busan, qui sait combien de temps elle restera? Personne ne le sait, même pas elle-même. Elle pourrait partir dans un an, un mois, voire même ce soir. Il est difficile pour Haru de s’imaginer enracinée quelque part, non pas nomade. Se dire que cette ville est sa maison est trop soudain, même si elle côtoie les gens de Busan depuis quelques années déjà, il y a toujours une distance entre elle et le monde extérieur. Trouvera-t-elle un endroit qu’elle pourrait qualifier de foyer un jour? Seul l’avenir nous le dira..

o9 ⊱ TEARS - Exacerbées, intensifiées, ce sont les mots qui seraient les plus appropriés pour qualifier les émotions de la jeune Kobayashi. Avec elle c’est tout ou rien. Lors de ses moments de faiblesse Haru reste entière et fidèle à elle-même, entière ; vous la verrez probablement les larmes aux yeux, les joues maculées de mascara.

1o ⊱ DANGEROUSLY IN LOVE - L’amour fait mal, il n’y a aucun doute. Comme toutes les femmes de cette terre, Haru a gouté aux plaisirs de la chair qui font mal, qui blessent et vous laissent sur le trottoir. Les disputes incessantes, le manque de confiance et les problèmes que l’ont se créer soi-même sont un quotidien que Haru doit combattre. Elle décide de ne plus se mettre dans ce genre de situation. Les sentiments sont dangereux, semblable à un pistolet où elle tient la gâchette, prête à tirer à tout moment. Mais malheureusement elle n’apprendra jamais, ne grandira jamais face à ce genre de situation. Jouer avec le feu est excitant, comme une roulette russe où, à n’importe quel moment, vous pouvez vous faire sauter le cerveau.